L'Odyssée intérieure

Couverture du livre
Le 10 décembre 1996 Jill Bolte Taylor, neuro-anatomiste à l'Université de l'Indiana, est victime d'un accident vasculaire cérébral, dû à la rupture d'une artère dans l'hémisphère gauche de son cerveau. Sa qualification professionnelle lui permet d'analyser finement cette dramatique expérience mais aussi de nous conter par le menu dans Voyage au-delà de mon cerveau [1] ce qui lui est arrivé et comment elle a réussi à survivre, et même à reconquérir une vie normale.

Elle nous fait vivre de l'intérieur le moment où tout explose dans sa tête, sa sensation d'être un nourrisson dans un corps d'adulte, son état modifié de conscience, son impression de ne plus faire qu'un avec le reste de l'univers. La moitié gauche de son cerveau ne contrebalance plus la moitié droite, laquelle a pris le pouvoir. Une quiétude bienfaisante l'envahit, ce qui la met d'autant plus en danger qu'elle a perdu la notion des nombres et du temps. Va-t-elle, malgré tout, réussir à téléphoner pour demander du secours ?

Au sortir de la phase aiguë, pendant laquelle les médecins l'opèrent de son hémorragie et parviennent à la sauver, elle ne sait plus marcher, ni parler, ni lire, ni écrire et n'a plus de souvenirs. Pourtant, en tant que spécialiste, elle ne doute pas de la plasticité de son cerveau, ce qui lui permettra, en huit ans, de récupérer complètement. Au début, elle ne pense plus qu'en images : « Si l'on m'avait demandé 'À qui Bill Clinton est-il marié ?' j'aurais sans doute visualisé Bill puis le concept de mariage et, avec un peu de chance, une image d'Hillary au côté de son époux me serait apparue. »

Résiliente par nature, et avec sa mère comme tuteur de résilience, elle s'appuie sur ce qui fonctionne bien en elle, son cerveau droit - qui conçoit en images - pour reconquérir ses facultés. Elle entraîne son cerveau gauche à mettre des mots sur sa vision globale du monde. Exemple  : pour réapprendre l'anatomie du cerveau elle fabrique un vitrail coloré en forme de cerveau, avec des circonvolutions colorées. C'est ainsi que les noms des aires cérébrales lui reviennent peu à peu en mémoire. Elle ne se plaint jamais, même lorsqu'il lui faut quatre ans pour réussir sa première addition, six ans pour parvenir à monter les escaliers quatre à quatre. Aujourd'hui elle s'exprime comme tout le monde dans les conférences qu'elle donne et, si elle ne parlait pas de son aventure, personne ne se douterait de rien.

Ce livre plaira à tous ceux qui aiment l'aventure humaine. Les médecins, en particulier les neurologues, y apprendront non pas comment un cerveau fonctionne, ils le savent déjà, mais comment on le fait fonctionner.

[1] Éditions JC Lattès.
[pour MC qui m'a fait découvrir ce livre exceptionnel]