Métalepse
Par le gardien le samedi 10 décembre 2005, 00:02 - Métamots - Lien permanent
Figure de style consistant en un transfert de signification. Du grec metalepsis, changement, échange. Exemple ...
Le mot et la chose
- Madame, quel est votre mot
- Et sur le mot et sur la chose ?
- On vous a dit souvent le mot,
- On vous a souvent fait la chose.
- Ainsi, de la chose et du mot
- Pouvez-vous dire quelque chose.
- Et je gagerai que le mot
- Vous plaît beaucoup moins que la chose !
- Pour moi, voici quel est mon mot
- Et sur le mot et sur la chose.
- J'avouerai que j'aime le mot,
- J'avouerai que j'aime la chose.
- Mais, c'est la chose avec le mot
- Et c'est le mot avec la chose ;
- Autrement, la chose et le mot
- À mes yeux seraient peu de chose.
- Je crois même, en faveur du mot,
- Pouvoir ajouter quelque chose,
- Une chose qui donne au mot
- Tout l'avantage sur la chose :
- C'est qu'on peut dire encor le mot
- Alors qu'on ne peut plus la chose...
- Et, si peu que vaille le mot,
- Enfin, c'est toujours quelque chose !
- De là, je conclus que le mot
- Doit être mis avant la chose,
- Que l'on doit n'ajouter un mot
- Qu'autant que l'on peut quelque chose
- Et que, pour le temps où le mot
- Viendra seul, hélas, sans la chose,
- Il faut se réserver le mot
- Pour se consoler de la chose !
- Pour vous, je crois qu'avec le mot
- Vous voyez toujours autre chose :
- Vous dites si gaiement le mot,
- Vous méritez si bien la chose,
- Que, pour vous, la chose et le mot
- Doivent être la même chose...
- Et, vous n'avez pas dit le mot,
- Qu'on est déjà prêt à la chose.
- Mais, quand je vous dit que le mot
- Vaut pour moi bien plus que la chose
- Vous devez me croire, à ce mot,
- Bien peu connaisseur en la chose !
- Eh bien, voici mon dernier mot
- Et sur le mot et sur la chose :
- Madame, passez-moi le mot...
- Et je vous passerai la chose !
[Charles-Gabriel de Lattaignant (1697-1779), abbé et chanoine de Reims, entré dans les ordres par discipline familiale, voltairien, était avant tout un poète bon vivant et un chansonnier mondain. On lui doit la chanson populaire J'ai du bon tabac dans ma tabatière.]Abbé de Lattaignant
Commentaires
Bien vu, Joël. Un concours de métalepses paraît désormais s'imposer. Je l'organiserai en janvier, il y a une petite idée en train de germer. Je l'appelerai plutôt quelque chose comme "Concours Langue de bois".
En situation d'échec scolaire ? Quel vilaine expression. Ne sais-tu pas Joël qu'au royaume de l'éducation elle est proscrite, il faut dire en situation de réussite différée.
Au concours de langue de bois, les enseignants seront favorisés, garde. Le jargon des pédagogos en regorge.
C'est un jeu, plus qu'un concours. D'ailleurs je prépare un règlement un peu tordu qui va pousser les "candidats" à donner le meilleur d'eux-mêmes. Nous démarrerons le lundi 2 janvier.
Je sens que je vais adorer ce jeu. Affuter vos plumes, j'attends de vous lire.
Mon truc en plumes, plumes de zozos ...
Superbe! ébourifestif! réjouissif! Je viens de découvrir votre blog. J'ignorais qu'on pouvait trouver de telles perles sur le Web (ben oui, vous savez, moi, 'suis analyste-programmeur, et dans les langages artificiels, vous savez, mon bon Monsieur...).
Ouiiiiiiiiii: un concours Langue de Bois!
Si je comprends bien les différences entre ces figures de style, créatrices de mots parfois. Si la métaphore est un rapprochement, évident pour le lecteur, entre deux "mots", la métonymie,un rapprochement avec un lien de réalité, ( la synecdoque , cas particulier d'une partie pour le tout, ) la métalepse, elle, fait un rapprochement plus subtil et culturel...
C'est bien ça ?
La métaphore est une comparaison dont on sous-entend un des éléments : dans l'expression "Le manteau de la nuit", la nuit est comparée à un personnage mais ce n'est pas dit. La métonymie est un glissement de sens avec rapport d'interdépendance : on prend la cause pour l'effet ("Montrez-moi votre travail"), l'effet pour la cause ("Avez-vous du feu ?"), le contenant pour le contenu ("Boire un verre"), etc. La synecdoque est le cas particulier de métonymie, dans laquelle on prend la partie pour le tout ("Une voile" pour "Un bateau"). Dans la métalepse il n'y a pas d'interdépendance entre les deux sens du terme (ici "chose" et "amour" n'ont théoriquement rien de commun).
Très amicalement, la rhétorique est splendide, mais quid de la conjugaison ? A moins d'avoir raté quelque chose, j'aurais écrit : "chose" et "amour", n'ont théoriquement rien de commun.
Me trompé-je ?
Merci. Ce vendredi 6 janvier 2006 à 18 h 22 je devais être très fatigué. J'ai également écrit "interdépence". Comme vous pouvez le constater j'ai corrigé le texte.
dommage, j'ai un an de retard pour le concours Metalepses et langue de bois...J'aurais adoré.
pour la métaphore, un brin de poésie s'il vous plaît ...
Quelle est le matériau caché sous la couche, la sous-couche et la sous sous couche ?
Le sein d'une femme sous ses épaisseurs diverses de tissus.... ou la pierre précieuse sous diverses épaisseurs de croutes terrestres ?
Qui donc a le plus d'intérêt à cacher la réalité, l'image ou sa pensée sous une enveloppe quelle qu'elle soit ?
L'usurpateur .... l'artiste .... ou encore l'écrivain ?
La métaphore ...
... un outil de dissimulation ou au contraire de mise en perspective de la réalité ?
Demandez donc à Nietzsche ! ... explorez donc les figures libres d'Ainsi parlait Zarathoustra !
le lien sur le mot synecdoque ne marche pas ...
dommage, mais merci pour ce site
LB
Le lien ne marche pas pour la bonne raison ... qu'il n'y a pas de lien. En revanche cliquez deux fois sur le mot "synecdoque" (comme sur tous les mots du Garde-mots) et vous aurez une définition.