Il ne faisait pas bon être républicain sous la Monarchie de Juillet. Le 14 avril 1834 il se produisit à Paris un soulèvement populaire, consécutif à l'insurrection des canuts à  Lyon le 9 avril. Ces manifestations étaient causées par les mesures antirépublicaines prises par Adolphe Thiers en tant que Ministre de l’Intérieur, en particulier des lois restreignant  la liberté d’association. Au passage d’un détachement militaire devant une barricade  rue Transnonain [1], à Paris, un coup de feu est tiré depuis une maison située au numéro 12. Un officier est tué. Les soldats investissent la maison et massacrent sans distinction tous les habitants : hommes de tous âges mais aussi femmes et enfants. La brigade est commandée par le futur maréchal Bugeaud. Bien qu’il n’ait pas directement participé à cet événement la population parisienne, en état de stupeur, le lui reprochera longtemps.

Transnonain Daumier

Cet événement inspira à Honoré Daumier une lithographie d’une expressivité et d'un réalisme tels qu’on la considère généralement comme une véritable œuvre d'art. Elle fut publiée dans L'Association mensuelle du 24 septembre 1834, le magazine de Charles Philipon qui était également le fondateur du Charivari.

Baudelaire écrira en 1857 à propos de l'évocation graphique de ce massacre : « Ce n'est pas précisément de la caricature, c'est de l'histoire, de la triviale et terrible réalité ». Gustave Flaubert reprendra le thème en 1869 dans  L’Éducation sentimentale : « Un jour, — à quinze ans, — dans la rue Transnonain, devant la boutique d’un épicier, il avait vu des soldats la baïonnette rouge de sang, avec des cheveux collés à la crosse de leur fusil ; depuis ce temps-là, le Gouvernement l’exaspérait comme l’incarnation même de l’Injustice. »


[1] Elle s'est appelée successivement rue Trousse-Nonnain, rue Trace-putain, rue Tasse-Nonnain puis rue Transnonain. Elle deviendra une partie de la rue Beaubourg en 1851.