Éloge de l’oubli

L'oubli est nécessaire, comme Baudelaire nous le rappelle. C’est une mort symbolique, une purification, un soulagement  :

Pour engloutir mes sanglots apaisés -
Rien ne me vaut l'abîme de ta couche ;
L'oubli puissant habite sur ta bouche,
Et le Léthé coule dans tes baisers.

L’oubli est une avancée vers de nouveaux désirs, de nouvelles réalités, une voie vers la connaissance et la création. Avec lui tout peut recommencer. Il prépare l'avenir, rend possible de nouveaux choix, il peut même être salvateur. Pour Nietzsche  (Considérations inactuelles, 1874) c’est une des conditions du bonheur : « L'homme qui est incapable de s'asseoir au seuil de l'instant en oubliant tous les événements du passé, celui qui ne peut pas, sans vertige et sans peur, se dresser un instant tout debout, comme une victoire, ne saura jamais ce qu'est un bonheur et, ce qui est pire, il ne fera jamais rien pour donner du bonheur aux autres. »

Le juste oubli n'empêche pas le devoir de mémoire, la culture, l'attention, l'imagination, la vigilance, la curiosité, la réparation.