Pygmalion et le pygmalionisme
À sa naissance Aphrodite (Vénus), déesse de l’amour et de la beauté, a été portée par les flots jusqu’à Chypre mais les habitantes d’Amathonte, ville où on lui rend un culte, refusent de l’honorer. Courroucée, Aphrodite décide de les punir en les condamnant à la prostitution. Le sculpteur Pygmalion fuit la débauche des femmes de son île et reste volontairement célibataire, cependant il n’abandonne pas l’idée de l’amour. Voici qu'il s’éprend d'une statue d'ivoire dont il est l'auteur et qu'il appelle Galatée. En donnant vie à la statue Aphrodite exauce son vœu le plus cher. Pygmalion épouse sa création : de leur union naît une fille nommée Paphos qui sera la fondatrice de la ville du même nom dans l’ile de Chypre.
Dans un style flamboyant Ovide nous raconte le miracle : « C’était la fête de Vénus. Chypre tout entière célébrait cette fameuse journée. L’or éclate sur les cornes recourbées des génisses au flanc de neige qui, de toutes parts, tombent sous le couteau ; l’encens fume : Pygmalion dépose son offrande sur l’autel, et debout, d’une voix timide : « Grands dieux, si tout vous est possible, donnez-moi une épouse... (il n’ose pas nommer la vierge d’ivoire) semblable à ma vierge d’ivoire ». Vénus l’entend ; la blonde Vénus, qui préside elle-même à ses fêtes, comprend les vœux qu’il a formés ; et, présage heureux de sa protection divine, trois fois la flamme s’allume, trois fois un jet rapide s’élance dans les airs. Il revient, il vole à l’objet de sa flamme imaginaire, il se penche sur le lit, il couvre la statue de baisers. Dieux ! Ses lèvres sont tièdes ; il approche de nouveau la bouche. D’une main tremblante il interroge le cœur : l’ivoire ému s’attendrit, il a quitté sa dureté première ; il fléchit sous les doigts, il cède. Telle la cire de l’Hymette s’amollit aux feux du jour, et, façonnée par le pouce de l’ouvrier, prend mille formes, se prête à mille usages divers. Pygmalion s’étonne ; il jouit timidement de son bonheur, il craint de se tromper ; sa main presse et presse encore celle qui réalise ses vœux. Elle existe. La veine s’enfle et repousse le doigt qui la cherche ; alors, seulement alors, l’artiste de Paphos, dans l’effusion de sa reconnaissance, répand tout son cœur aux pieds de Vénus. Enfin ce n’est plus sur une froide bouche que sa bouche s’imprime. La vierge sent les baisers qu’il lui donne ; elle les sent, car elle a rougi ; ses yeux timides s’ouvrent à la lumière, et d’abord elle voit le ciel et son amant. Cet hymen est l’ouvrage de la déesse ; elle y préside. Quand neuf fois la lune eut rapproché ses croissants et rempli son disque lumineux, Paphos vint à la lumière, et l’île hérita de son nom. » (Ovide. Les Métamorphoses, Livre X).
Ce mythe ancien a traversé les siècles. Il a été très souvent repris dans l’art et la littérature, y compris par Jean-Jacques Rousseau. La raison principale en est qu’un artiste met l’essentiel de lui-même dans son œuvre, y compris son narcissisme. Parmi les autres : les notions de double, de perfection, l’imitation de la nature ou mimesis, le geste divin de création…
La nouvelle Galatée
L’ivoire est actuellement interdite mais nos contemporains ont trouvé la parade. Cliquez vite pour découvrir le nouveau visage de Galatée.