Léthé
Par le gardien le lundi 23 mars 2009, 00:00 - Singumots - Lien permanent
L'oubli est nécessaire, comme Baudelaire nous le rappelle. C’est une mort symbolique, une purification, un soulagement :
Pour engloutir mes sanglots apaisés -
Rien ne me vaut l'abîme de ta couche ;
L'oubli puissant habite sur ta bouche,
Et le Léthé coule dans tes baisers.
L’oubli est une avancée vers de nouveaux désirs, de nouvelles réalités, une voie vers la connaissance et la création. Avec lui tout peut recommencer. Il prépare l'avenir, rend possible de nouveaux choix, il peut même être salvateur. Pour Nietzsche (Considérations inactuelles, 1874) c’est une des conditions du bonheur : « L'homme qui est incapable de s'asseoir au seuil de l'instant en oubliant tous les événements du passé, celui qui ne peut pas, sans vertige et sans peur, se dresser un instant tout debout, comme une victoire, ne saura jamais ce qu'est un bonheur et, ce qui est pire, il ne fera jamais rien pour donner du bonheur aux autres. »
Le juste oubli n'empêche pas le devoir de mémoire, la culture, l'attention, l'imagination, la vigilance, la curiosité, la réparation.
Commentaires
Vivement l'éthé que l'on oublie l'iver!
Ze:D
J'aime autant Léthé que les cafés.
Comme fleuves de l'Enfer, celui qui me vient spontanément à l'esprit est le Styx, et puis je pense aussi à l'Achéron. J'avoue ne pas connaître les autres, il paraît qu'il y en a 5
Je peux y ajouter maintenant le Léthé, merci, garde-mot !
Dans la mythologie grecque les cinq fleuves du royaume des morts où régnait le dieu Hadès, c'est-à-dire les Enfers (et non "l'Enfer") étaient :
- l'Achéron, que les âmes des morts devaient franchir sur la barque de Charon avant de résider dans leur séjour définitif ; le retour n'était pas possible sauf pour quelques héros ; il empoisonnait les mortels qui voulaient boire son eau ;
- le Phlégéton, qui roulait des flammes ;
- le Cocyte : il s'accroissait des larmes des méchants et sur ses bords les morts privés de sépulture attendaient la décision des juges concernant le sort qui leur serait réservé ;
- le Styx (le principal fleuve des Enfers, qui roulait ses eaux glacées au milieu des ténèbres et qui donnait l'immortalité ;
- le Léthé, fleuve de l'oubli.
L'oubli comme condition de résilience.
Oui, mais pas n'importe quel oubli. Un oubli "positif", sans haine ni remords.
Où donc est passé l'éthéré? Peut-être las, sans un mot assoupi dans sa barque maudite, ses rames oubliées…
Où donc est passé l'été, Ray? Peut-être là, cent un mots et sous pli, dans la marge ébaudi, les drames oubliés…
Ze:D