Entre couleurs et légèreté, nostalgie et
dynamisme,
folklore russe et judéité, l'œuvre de Chagall est heureusement
inclassable. Pour s'en convaincre il suffit de visiter l’exposition
Chagall et
l’avant-garde russe, prêtée par le Centre Pompidou au
musée de Grenoble
jusqu'au 13 juin 2011. Marc Chagall (1887-1985) y est la figure de proue d'une
série de 24 artistes du début du XXe siècle présents à travers plus de 150
œuvres, entre autres
Natalia
Gontcharova, Michel Larionov, Kazimir Malevitch,
Vassily Kandinsky, le sculpteur
Ossip Zadkine, le
photographe
Alexandre Rodtchenko.
On retrouve avec un plaisir presque physique,
en tout cas sensoriel, quelques unes de ses toiles majeures :
Le Mort (1909) qu'il
considérait comme le point de départ de son œuvre,
Le Marchand de
bestiaux dans sa deuxième version (1912),
Le Marchand de
journaux (1914), Double portrait au verre de vin (voir l'illustration
ci-dessus, 1917-1918),
Le violoniste vert (1919-1920) et surtout (ma préférée)
La
Noce (1911) :
Moïshe Zakharovitch Chagalov, dit Marc Chagall.
La Noce
1910. Huile sur toile de lin. Centre Pompidou, Paris.
Un cortège nuptial aux couleurs
dansantes se rend à l'auberge où l'accueille une accorte dame en jaune.
En tête quatre musiciens, suivis des mariés qui échangent un regard, de la
famille très unie, des amis à l'imposante stature et d'un symbole des petits
métiers de la ville de Vitebsk (Biélorussie) où est né Chagall, le porteur
d'eau. En haut les longs rectangles ont un air de fête. Les grands carrés
au centre forment un arrière-plan de maisons irrégulières. Les triangles
au sol pointent vers les mariés et donnent à la toile sa profondeur.
Après l'avoir vendu Chagall racheta ce tableau et le conserva toute sa vie. Un
siècle après sa composition, La Noce rachète encore joyeusement notre
quotidien.
Autographe de Chagall
apposé sur son livre Ma vie (Stock, édition de 1957).
Collection particulière du gardien.
En sortant de l'exposition, il est recommandé
d'accorder un long moment à la
collection permanente du
musée de
Grenoble, l'un des tous premiers de France, où l'on retrouve comme il se
doit de nombreux artistes majeurs (Rubens, Canaletto, Frédéric Bazille, Paul
Gauguin, Picasso, Renoir, Fernand Léger, Matisse, etc.) mais aussi des peintres
régionaux de premier plan.
Commentaires
Chagall... Il y a, pour moi, de l'amour , de l'essence d'amour, dans son pinceau, ses couleurs, ses espaces, sa composition. Comment expliquer... Ses traits, ses couleurs, ses thèmes, son « écriture picturale » pour ainsi dire, sont imprégnés d'amour. Est-ce la touche de naïveté, de candeur, de sagesse, d'intelligence de l'être, de la vie qui rend tout ceci possible?
Chacun, chacune ira y trouver un réconfort pour l'« âme », ce principe de vie qui régit et rend unique le cerveau, la vie de chaque individu, incluant sa génétique.
Merci pour ce beau billet, Gardien.
Zède
Air fou. Je souscris entièrement à ce que tu dis de Chagall.
Dandylan. Genoble est loin pour toi mais pas Chagall, j'en suis sûr ! Tu as sûrement vu ces œuvres à Beaubourg. La différence c'est la muséographie, l'arrangement, la juxtaposition des toiles, les commentaires dans les audiophones.
s'il était parmi nous, nous lui souhaiterions aujourd'hui sa fête. Marc, ce prénom il a du j'imagine le choisir, pour quelle raison ?
Je me suis vaguement posé la question et ton commentaire m'a incité à aller plus loin. J'ai trouvé la réponse dans cette thèse d'histoire de l'art (Chan Young Park, La Bible illustrée par Marc Chagall (1887-1985) : un dialogue interculturel et son évolution, Note 20, page 22) : « C’est un nom francisé à sa guise. Son nom juif de naissance était Móyshe Shagal. Le certificat officiel de naissance en russe l’enregistrait comme Movsha Khatskelev. Movsha est l’équivalent de Moïse en russe. Chagall utilise le prénom Marc dès son premier séjour à Paris. D’après Benjamin Harshav, ce nouveau prénom de Chagall a été influencé par ses mécènes saint-pétersbourgeois qui souhaitaient voir en lui « le second Marc Antokolsky » (1843-1902), éminent sculpteur russe. Benjamin Harshav, Marc Chagall and His Times – A Documentary Narrative, op. cit., p. 63. »
Marc Antokolsky était un sculpteur important de l'époque.
Beau commentaire! surtout sur "La Noce". Quant au violoniste vert, je crois me rappeler qu'il est violet ou me trompé-je??? Et pour ceux qui sont loin de Grenoble, une passionnante expo Chagall et la Bible jusqu'au 5 juin au Musée d'Art et d'histoire du Judaisme a Paris (avec de longues citations bibliques sous les oeuvres) ou, un peu plus loin, une a Philadelphie et une a Taipei. Y'a d'quoi faire!
J'avais oublié la couleur de la peau... merci et bon ler mai.
"Si toute vie va inévitablement vers sa fin, nous devons, durant la nôtre, la colorier d’amour et d’espoir." - Marc Chagall
Sans aucun doute Chagall, il l'a fait. Merci Garde par ce beau billet.
Saludos, Ana
Bonjour Ana. Chagall, avec ses couleurs, ses arbres, ses coqs, ses mariés, est certainement l'un des peintres qui donnent de l'espoir. Il ne réduit pas la vie comme Picasso, ne la détourne pas comme Dalí, il l'enchante.