Copeau
Par le gardien le lundi 3 avril 2006, 00:00 - Actumots - Lien permanent
Edvard Munch. Le cri.
Vous reprendrez bien un peu de copeaux ?
Une déclaration du ministre de l’Agriculture, Dominique Bussereau, nous apprend que des copeaux de bois vont bientôt parfumer les vins français, y compris les grands vins de terroir. Si l'utilisation de copeaux est pour l'instant prohibée, il doit bien y avoir une raison, non ? Alors pourquoi nous menace-t-on de rétablir cette pratique d’un autre âge (courante au XVIIe siècle) ? Il s’agit, paraît-il, de « séduire la clientèle avec un goût boisé » ...
Jus de raison contre jus de raisin
Certes la pratique est autorisée par l'Union européenne. Certes la mondialisation est cruelle avec la filière viticole. Ces raisons ne sont pas suffisantes, pour autant, pour que nous laissions des marchands jouer à qui-perd-gagne avec notre palais. Le vin a plusieurs milliers d’années, mais – qui sait ? - il aura peut-être disparu avant la fin de ce siècle ... Il est question, nous dit-on, de « faire le vin du consommateur », d'adapter la production viticole aux lois du marché, quitte à aller « à l'encontre du goût français pour séduire les palais étrangers », comme le suggère le rapport de Bernard Pomel commandé par le ministère de l'Agriculture, « au risque de heurter les puristes » … Si je comprends bien, nous devons oublier le don que la nature nous a faits et arrêter de nous cramponner à une tradition archaïque ? Les français ont montré leur méfiance à l'égard de l’Europe unie. Le monde politique s’imagine peut-être qu’en leur désapprenant le goût de l’authentique il va regagner leur confiance ?
Les papilles font de la résistance
Après le vin de garage voici le vin de copeaux, à l'arôme truqué dans des barriques en inox. Ce sera sans mes papilles car je ne bois que lorsque c’est bon. J’aime le vin de vigneron mais pas celui des œnologues. J’en consomme peu mais j’aime l’idée qu’au fond de mon verre il y a un terroir, l’amour d’un vigneron pour sa vigne, un soin de parent expérimenté pour son enfant fragile, et tout au long d’une année de patience une pensée pour l’amateur que je suis. J’aime beaucoup Rimbaud et Baudelaire mais je ne les lis pas tous les jours. Eh bien je ferai la même chose avec le vin. Je n’en boirai que lorsque j’aurai la preuve qu’il y a du vin dans le vin. Le vin ce n’est pas du jus de raisin, plus de l’alcool, du sucre et des tanins. C’est avant tout un objet culturel. Laissons aux économistes la mathématique du vin. Revendiquons haut et fort le vin-plaisir, en quantité modérée, et le divertissement qu'il nous procure. Le vin c’est à nous qu’il appartient !
Appellation d’origine copeaux
Finalement la solution est simple. Exigeons que la loi oblige les vins de laboratoire à afficher la présence de copeaux sur leurs étiquettes. J'imagine d’ici le tolle chez les industriels du vin. Oui, mais que voudrait dire une résistance de leur part ? S’ils ne sont pas d’accord c’est que leur pratique est douteuse, non ? Bientôt nous devrons abandonner les prestigieux AOC, réduits sans vergogne à la mention « Appellation d’origine copeaux ». Quelque chose de l’ordre de l’humain aura disparu. Il n'y aura plus qu'à inventer le vin d'acier, le vin de cuivre, le vin de plomb puis à supprimer le jus de raisin et les levures afin que la dernière trace de fermentation disparaisse de ce breuvage enfin standardisé.
Commentaires
Mais comment vais-je pouvoir manger mon fromage, moi, pauvre franchouillard amateur de Chassagne, Pommard et autre Nuit St Georges ?
Je sens qu'il va falloir que j'apprennes à lire les étiquettes en détail. Grrr !!!
Maître Folace : 50 kilos de patates, un sac de sciure de bois, il te sortait 25 litres de 3 étoiles à l'alambic; un vrai magicien Jo.
(...)
Paul Volfoni : Vous avez beau dire, y'a pas seulement que de la pomme, y'a autre chose, ce serait pas des fois de la betterave ? Hein ?
Monsieur Fernand : Si, y'en a aussi.
Merci de ne pas citer le nom de ce film, ça prouve qu'il est cult(urel). Si quelqu'un l'écrit ici, j'efface son commentaire, en hommage à Audiard, ainsi qu'à Lino, Bernard, Francis, Jean ... Si ça fait plaisir à Lautner, tant mieux, c'est normal.
Je dois dire que ça me fait plaisir aussi de lire cette référence ici. Mais faut qu'en même admettre que c'est plutôt une boisson d'homme.
(j'ai connu une polonaise qu'en buvait tout les matins au petit déjeuner)
Ce n'est pas une boisson d'homme, et d'ailleurs, je vais te révéler un secret : les femmes en boivent mais n'en parlent habituellement pas.
D'ailleurs tu vas voir. SOS, est-ce qu'une femme ou deux pourraient témoigner anonymement sur ce sujet, SVP ? Je pensent que vous rendriez service à celles qui n'osent pas aborder le sujet, ni avec leur partenaire ni avec leur médecin.
Cher garde-mot,
Juste pour votre information, j'ai créé un lien sur mon blog car je vous rends visite régulièrement, et aussi afin de vous remercier de votre très beau commentaire sur ma toile "Caractère". Merci mille fois, j'ai été très touché. Caron.
Ça me fait plaisir, grand merci.
Comme c'est tragique tout cela. Et beau. "Quelque chose de l’ordre de l’humain aura disparu."
A nouveau, tout n'est que recherche d'identité, crainte de perdre la réalité, les repères, les valeurs.
Quand on s'inquiéte du devenir des choses, j'aime à écarter ma vue au niveau de l'humain justement. Pour songer que cette civilisation n'en a plus pour tellement longtemps, et que l'humanité finira par retrouver ses racines viticoles, sans copeau.
Mais cela ne me dit pas si je continuerai à pouvoir fournir ma table en bon vin...
Un superbe site consacré à la bande à Audiard ...
Qu'on le veuille ou non le spam existe, personne ne le conteste. Contingent, parfois contestataire, condamnable, il est tout sauf convivial et l'on doit le combattre quand on le rencontre. La dialectique sécurité-liberté nous aide à comprendre ce phénomène contemporain, mais il nous est difficile de contenter de la philosophie pour y puiser notre consolation.
Je laisse donc, sans calcul, les initiales du club des ultra-libéraux dans la liste des mots suspects. J'aurais souhaité, comme dans Word, avoir à ma disposition une case à cocher permettant de préciser si une suite de lettres représente ou non un mot entier, mais Marko me dit que ce n'est pas possible.
Pendant que j'y suis, Traces, si vous passez par ici, sachez que vos commentaires vont systématiquement dans mon spam et je n'en connais pas la raison. Je jure qu'il n'y a ni "traces" ni "écrites" dans ma liste ... .
Petite anecdote sur le vin que j'ai longtemps boudé et pour cause ! "on aimait bien me mettre des gouttes de VIEUX P*P*dans mon verre d'eau...". J'ai toujours pensé que le vin était franchement dégueulasse suite à cela...
Et puis j'ai eu la chance de cotoyer quelques connaisseurs qui m'ont fait gouter à quelques vins de qualité et j'ai changé d'avis ...
Petite astuce : si vous voulez dégouter quelqu'un du vin c'est très facile : une bonne vieille bouteille de ce fumeux Vieux p*p* ... un régal pour les papilles : O
Fumeux ou fameux ? J'ai mis des astérisques pour ne pas être poursuivi pour dénigrement.
je ne m'y connais pas du tout en vin, mais c'etait pour faire le parallele entre le mot Copeau et le livre Un bonheur insoutenable; un combat d'un personnage surnommé Copeau qui ressemble à 1984 et Le meilleur des mondes, sorti a peu près en meme temps il a subit le triomphe de ces deux derniers...
dumby
Les supermarchés ne valent pas grand chose pour le vin.
Il y a pas loin de chez moi une toute petite boutique qui ne vend que du vin, elle est tenue par deux frères qui s'y connaissent comme personne d'autre, avec eux pas besoin de lire les étiquettes, ils savent tout sur chaque bouteille de leur stock . Ils ne s'arrêteraient jamais de vous raconter l'histoire de ...
Hélas! il n'y en a plus beaucoup sur notre territoire, et je recommande à *** de trouver un petit magasin comme celui-là, il n'aura plus d'étiquettes à déchiffrer et il se laissera guider avec délices .