Le Taiseux
(Julos Beaucarne)

Le taiseux s'apprête à sourire
Mais trop de monde
Il n'ose pas
Il rentre dans sa nuit profonde
Il ferme un peu plus les bras
Le compas de l'horloge indique
Une heure précise
Qu'il ne voit pas
Il voudrait placer l'incise
L'incisive parole
Faire le pas
Dire enfin sa vie et sa foi
Mais les mots restent dans sa bouche
Car ce sont de vieux mots patois
Si usés que la rouille insidieuse
A usé doucement les parois
De la vieille machine à dire
Où les mots se forment parfois.

Julos Beaucarne fut invité en 1973 à Skanès (Tunisie) dans un club de vacances. Il se produisit un soir devant les "gentils membres" et c'est ainsi que je l'ai découvert. Cet artiste complet mérite une petite visite.

Les taiseux célèbres
Coïncidence


La chaîne Arte diffusait hier soir le très beau film de Jean-Pierre Melville, Le Samouraï, avec Alain Delon. Je ne le savais pas au moment où j'ai préparé ce billet. Bien entendu j'ai regardé (pour la 4 ou 5e fois) l'histoire de ce tueur à gages, Jef Costello, chargé d'éliminer le patron d'une boîte de nuit. Seul contre tous, traqué, silencieux, il finit par se laisser aller. J'en ai profité pour tenter de percer le secret de ce film sans aucune ride (à part un vieux magnétophone). Il semble s'agir de la sobriété : unité de couleur, le bleu (le métro, la blouse de la poinçonneuse de tickets, la salle de bains, le chapeau du tueur, les complets des policiers, les yeux de Delon sont bleus), silences entrecoupés de bruits justes et nettement audibles, dialogues volontairement sans effets, gestes précis. Delon a un visage impénétrable qui donne au film toute sa puissance.

Connaissez-vous d'autres taiseux ?