Turion
Par le gardien le vendredi 28 mai 2010, 00:00 - Singumots - Lien permanent
Botanique. Jeune pousse souterraine. Exemple :
le turion de l'asperge, que l’on extrait à l’aide d’une gouge C’est la partie
que l'on consomme après cuisson. Du latin turionem, jeune pousse.
Synonyme : hibernacle.
L’asperge est connue depuis l’Antiquité. Les Grecs la vouaient à Aphrodite, déesse de l’amour et lui accordaient des propriétés aphrodisiaques. Elle était connue au Moyen Âge sous le nom d'esparge. Louis XIV aimait beaucoup les asperges. Il demanda à son jardinier Jean de la Quintinie d'en cultiver dans le potager royal.
Proust parle à plusieurs reprise des asperges dans son œuvre : « Je m’arrêtais à voir sur la table, où la fille de cuisine venait de les écosser, les petits pois alignés et nombrés comme des billes vertes dans un jeu ; mais mon ravissement était devant les asperges, trempées d’outremer et de rose et dont l’épi, finement pignoché de mauve et d’azur, se dégrade insensiblement jusqu’au pied - encore souillé pourtant du sol de leur plant - par des irisations qui ne sont pas de la terre. Il me semblait que ces nuances célestes trahissaient les délicieuses créatures qui s’étaient amusées à se métamorphoser en légumes et qui, à travers le déguisement de leur chair comestible et ferme, laissaient apercevoir en ces couleurs naissantes d’aurore, en ces ébauches d’arc-en-ciel, en cette extinction de soirs bleus, cette essence précieuse que je reconnaissais encore quand, toute la nuit qui suivait un dîner où j’en avais mangé, elles jouaient, dans leurs farces poétiques et grossières comme une féerie de Shakespeare, à changer mon pot de chambre en un vase de parfum. » (Du côté de chez Swann).
L’asperge est connue depuis l’Antiquité. Les Grecs la vouaient à Aphrodite, déesse de l’amour et lui accordaient des propriétés aphrodisiaques. Elle était connue au Moyen Âge sous le nom d'esparge. Louis XIV aimait beaucoup les asperges. Il demanda à son jardinier Jean de la Quintinie d'en cultiver dans le potager royal.
Proust parle à plusieurs reprise des asperges dans son œuvre : « Je m’arrêtais à voir sur la table, où la fille de cuisine venait de les écosser, les petits pois alignés et nombrés comme des billes vertes dans un jeu ; mais mon ravissement était devant les asperges, trempées d’outremer et de rose et dont l’épi, finement pignoché de mauve et d’azur, se dégrade insensiblement jusqu’au pied - encore souillé pourtant du sol de leur plant - par des irisations qui ne sont pas de la terre. Il me semblait que ces nuances célestes trahissaient les délicieuses créatures qui s’étaient amusées à se métamorphoser en légumes et qui, à travers le déguisement de leur chair comestible et ferme, laissaient apercevoir en ces couleurs naissantes d’aurore, en ces ébauches d’arc-en-ciel, en cette extinction de soirs bleus, cette essence précieuse que je reconnaissais encore quand, toute la nuit qui suivait un dîner où j’en avais mangé, elles jouaient, dans leurs farces poétiques et grossières comme une féerie de Shakespeare, à changer mon pot de chambre en un vase de parfum. » (Du côté de chez Swann).
Édouard Manet (1832-1883)
Une botte d'asperges
Cologne, Wallraf-Richartz-Museum
En 1880 le collectionneur et rédacteur en chef
de La Gazette des arts Charles Ephrussi
(1849-1905) acheta à Manet ce tableau. Sachant que le peintre avait des
difficultés financières, il lui remit la somme de mille francs au lieu des huit
cents demandés.
Peu de temps après, Manet lui envoya un petit
tableau (Une asperge, Musée d’Orsay) accompagné de cet élégant
commentaire : « Il en manquait une à votre botte. » Marcel Proust s’est inspiré
d’Ephrussi pour certains traits de Charles Swann et Renoir le peignit dans son
tableau Le
déjeuner des canotiers (c’est l’homme au chapeau haut-de-forme).
Commentaires
Je ne pensais pas que l'on pouvait être si touché/e, écrire de telles louanges au sujet des asperges. L'œil de l'écrivain, du peintre. Alors que je cherchais d'autres turions, en images, je suis étonnée de voir que je trouve plutôt ceci et je cherche la métaphore qui aurait pu créer ce lien entre nature souterraine et technologie de pointe. Racines, sans doute... Et quel geste magnifique, cette anecdote du tableau. C'est délicieux à lire, tout ceci. Merci Gardien. Zed ¦)
Vous m'avez coupé le turion sous le pied avec Manet, mais heureusement, il y a les bodegones espagnols.
L asperge en littérature en peinture pourquoi pas en chant?
Et bien sur Google on trouve "le chant des asperges"
en fait, une explication des messes chantées et "aspergée " d' eau bénie !
Ma question : y a t il une relation entre le verbe asperger et une asperge?
Non car l'étymologie n'est pas la même. "Asperge" vient du grec asparagos, asperge. "Asperger" vient du latin spargere répandre, lui-même du grec speirein, semer.
Merci Garde par l´anecdote formidable des asperges de Manet, il est l'un de mes peintres préférés. Le botte et le petit aspergue solitaire sont magnifiques.
D´ailleurs,aprés la description des "nuances celestes" de Proust, j´ai envie d´aller acheter demain, au supermarché, ces "délicieuses créatures" pour le dîner.
Aura-t-il un autre turion, bien qu´il ne soit pas aussi célèbre et délicieux que les asperges?
En Picardie, le "touron" (que l'on prononce "turon", est le coeur , tendre et d'abord invisible, de la laitue