Bouffon
Par le gardien le vendredi 18 mai 2007, 00:00 - Singumots - Lien permanent
Étymologie : de l'italien buffone, dérivé de la racine onomatopéique buff- qui exprime le gonflement des joues (on la retrouve en français dans bouffer, bouffi), parce que le personnage grotesque du bouffon est présenté au théâtre avec de grosses joues. Le mot anglais correspondant est joker, celui qui fait des jokes (des bons mots). D'ailleurs dans les jeux de cartes le joker est habillé comme un bouffon.
Merci à Ydel pour son illustration originale.
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Au XVIIIe siècle, l'opéra italien se présente sous deux formes : l'opera seria (opéra sérieux) et l'opera buffa (ou opéra bouffe). Ce dernier, qui comporte des intermèdes comiques empreints de légèreté, avec en particulier le personnage du bouffon, est à l'origine d'une querelle artistique sans précédent.
La Querelle des Bouffons
1er août 1752. La troupe des Bouffons, composée de trois chanteurs italiens, vient de prendre ses quartiers dans une vénérable institution parisienne, l'Académie royale de musique, qui n'est autre que le futur Opéra. Elle obtient un franc succès avec La Serva Padrona (La Servante maîtresse) de Giovanni Battista Pergolesi, dit Pergolèse (1710-1736). Bientôt deux clans se forment : le Coin du Roi, appelé ainsi parce que ses partisans (entre autres d'Alembert et Fréron) prennent l'habitude de se rassembler sous la loge du Roi, favorable à l’opéra traditionnel français ; le Coin de la Reine (Grimm, Diderot, Rousseau et d'autres Encyclopédistes), de l'autre côté du théâtre, résolument pro-italien. Jean-Jacques Rousseau, opposé à l'art baroque de Lully et Rameau (lequel règne alors en maître sur la musique lyrique française), verse de l'huile sur le feu en publiant en novembre 1753 sa Lettre sur la musique française, dans laquelle il prend partie pour la musique italienne. Il reproche à Jean-Philippe Rameau son manque de naturel et sa trop grande richesse. Il stigmatise l'utilisation de la langue française qu'il ne trouve pas assez flexible pour l'exercice de la voix. Il affirme le primat de la mélodie sur l'harmonie et jure que la langue italienne se prête mieux à la mise en musique que la langue française. Pendant deux ans une soixantaine de pamphlets de divers auteurs entretiendra ainsi l'une des plus vives polémiques de l'histoire du théâtre lyrique. Le débat entre les tenants de l'art nouveau et populaire et ceux, plus conventionnels, de l’art officiel fait rage. Il dépasse la simple controverse artistique et sociale pour se muer en défense de l'identité nationale face à une menace d'impérialisme culturel étranger. C'est, en quelque sorte, le symbole de la résistance du classicisme au préromantisme naissant. L'extinction de la querelle se fera de manière autoritaire : le Coin du roi, qui compte dans ses rangs la maîtresse de Louis XV, Madame de Pompadour, obtiendra en 1754 le renvoi de la troupe des Bouffons au delà des Alpes.
L'Almanach 2010 du Garde-mots]
Commentaires
en djeun'z, le sens de _bouffon_ s'est étendu jusqu'à « fayot », puis finalement à toute personne respectueuse de l'ordre existant. C.-à-d. qu'à force d'extension, le sens s'est quasiment inversé.
Il est exact que le nom de Till l'espiègle dérive de l'allemand Till Eulenspiegel.
À part "joker", il y a aussi le vieil anglais "jester".
Merci pour ce pont jeté en direction de la culture anglaise.
>>Le mot anglais correspondant est joker, celui qui fait >>des jokes (des bons mots). D'ailleurs dans les jeux de >>cartes le joker est habillé comme un bouffon.
L'anglais joke (17e s. angl. joque) vient du latin jocus, (jeu, sport)
"Le mot anglais correspondant est joker, celui qui fait des jokes (des bons mots)."
J'apprends sur wikipedia:
"Joker can also be used as an insult to another person (e.g., "You're a Joker, mate"). In this context, the word joker means an idiot."
"You're a Joker" correspond bien à l'insulte "T'es un bouffon". Je ne vois pas comment du latin jocus (jeu, sport) on aurait glissé vers joker (celui qui fait des bons mots)!
L'étymologie retient mon attention car on retrouve la même idée de "gonflement" dans le mot "fou" follis, « soufflet pour le feu » et « sac, ballon plein d'air».
http://www.etudes-litteraires.com/l...
Trouvé ça aussi. Ah! Ce Voltaire ...