Simonetta Vespucci
Par le gardien le lundi 27 décembre 2010, 00:00 - Gardimots - Lien permanent
Piero di Lorenzo, dit Piero di Cosimo (vers 1480)
Simonetta Vespucci
Huile sur bois, Musée Condé, Chantilly.
Sa beauté idéale se détache sur un arrière-plan de nuages. L’un d’entre eux, plus noir que les autres, met en valeur son profil. Elle est tournée vers le passé, d’où se détache un arbre mort, comme si elle savait que ses jours étaient comptés. Son regard est absent, fixé sur un lointain auquel nous n’avons pas accès. Cette présence-absence du modèle est soulignée par le serpent qui s’enroule autour d’une chaîne et orne sa peau nue, symbole traditionnel de la tentation et qui donne au tableau une force inattendue. Fait-il partie intégrante du bijou ou est-ce un animal réel et menaçant ? Spectateurs médusés de la beauté universelle qu'il souligne, nous ne pouvons nous empêcher, en découvrant cet élément insolite, de penser à Cléopâtre. Le serpent annonce un destin tragique, mais il n’est pas obligatoirement cruel, car, selon la tradition picturale, il est le signe qu’elle connaîtra la vie éternelle. Quant au châle, dont la couleur est en correspondance avec celle des cheveux de Simonetta et en harmonie avec le sol, on ne sait s’il la vêt ou la dévêt. Il souligne, en tout cas, la rondeur de l’épaule et réchauffe la scène.
Les détails de ce tableau sont peints en fonction de leur exacte nécessité, sans voyeurisme ni flatterie : la sensualité, la sérénité, la perfection, le tragique, le paysage, tout est maîtrisé entre réel et imaginaire. L’idéalisation du modèle, trop tôt disparu, est à ce prix.
D’autres peintres aideront Simonetta, dite La Sans-Pareille, à traverser les siècles, en particulier Ghirlandaio, et surtout Botticelli qui la prendra comme modèle de la beauté dans une bonne partie de son œuvre, dont deux tableaux de la Galerie des Offices de Florence : Le printemps (1482) et La naissance de Vénus (1485).
Commentaires
Quelle gracieuse façon de finir l'année...
Si vous regardez le paysage du fond, vous verrez que la ligne d'horizon n'est pas à la même hauteur, détail que l'on retrouve dans la Joconde (en bcp plus marqué) 20 ans plus tard. Par ailleurs, on dit que Simonetta est représentée trois fois dans Le Printemps de Botticelli!
Bon, ou vos groupies veulent des mots et pas de l'art, ou bien ils sont tous bloqués dans les aéroports!
En regardant de nouveau, le petit bourrelet, à l'aisselle gauche... me ravit.
Bonne Année 2011 et merci de nous instruire en nous amusant tout au long de l'année.
La réalité est entre les deux. Les visiteurs du Garde-mots s'intéressent à l'art mais n'ont peut-être pas envie de mettre des mots sur leur émotion.
Merci ver00. Aucune œuvre d'art ne se laisse appréhender n'importe comment. Combien de visiteurs du musée du Louvre admirent la Joconde pour elle-même? Combien sont des touristes venus saluer une vedette ?
« Les détails de ce tableau sont peints en fonction de leur exacte nécessité, sans voyeurisme ni flatterie : la sensualité, la sérénité, la perfection, le tragique, le paysage, tout est maîtrisé entre réel et imaginaire. »
Vos mots me font penser à beaucoup de tableaux mais, plus qu'à la Mona Lisa, Simonetta me remet à une autre femme fameuse de Leonardo : Ginevra de Benci qui, a propos, on croit qu'elle était la fille d'Amerigo de Benci, l'ami de da Vinci qui beaucoup de personnes ont confondu avec Amerigo Vespucci : quelle coïncidence non ?
L'art émeut. Les mots aussi. Alors les mots sont art. Je ne sais pas si mon syllogisme est correct, mais les propositions et la conclusion oui. Aristote ne serait pas si fâché.
Merci Monsieur Horvilleur pour nous émouvoir avec votre blog de mots et d´art pendant tout le 2010!!!
Bonne Année a tous les amis du Gardemots!!!!
L'habitus, cher Gardien, quand y en a pour un, y en a pour...exercice de "décentrement" bien senti, il y en a "Bourdieu" et il avait raison ce mec plus ultra, l'habitus nous "déjoue" des tours jusqu'à l'embourgeoisement, nous qui "paissions" que notre amour "lavait" une santé de "faire"...reco-"naissance" quand tu nous "étreins" lieu d'amour absolu !
Merci Gardien !