La salaudace du satire-larigot était si grande qu'il avait réussi à amouratisser son village en une petite année, au point que toutes les femmes, sauf une, lui étaient tombées dans les bras. Quand il était triste il s'appliquait à retrouver leurs visages sur l'écran de sa mémoire, récitait leur prénom à voix basse et se remémorait les scènes les plus vives de ses rencontres avec elles.
C'est ainsi qu'il parvenait à troublier le sujet brûlant du moment, le traité constitutionnel européen, et la manière dont les média s'en était emparés. Cette eurobinetterie parolière lui paraissait totalement dénuée de vertu euroborative. Les eurodomontades euroburites étaient un véritable eurodéo qui le laissaient eurogatoire. Les débazookas télévisuels, pour le moins europaques, entre opposants et partisans du traité frisaient la débassesse et l'auliquéfaction. Ils provoquaient chez lui un riennui sans précédent que la présence affectueuse de son châtre n'arrivait pas à compenser, ainsi qu'une envie de se rendre à la gare la plus proche pour absendrier. Le grand tumultrason qu'on faisait autour du traité risquait de déclencher l'avitation des dronadaires et même une guerrien sans précédent.
Cette après-midi là une députain eurock&roll et un commystérique s'étripaient en direct sur le petit écran. Les voix de ce tandémagogue sans véritable idéal, qui cherchaient plus à compétiller qu'à convaincre, couvraient la bruitalie des fellévisions multiples que ses voisins tentaient derrières leurs impersiennes pour mieux oublier la pauvreté du paysage audiovisuel. Il trouvait ce tintamarché singulièrement fédérisoire.
Il se sentait comme un canicuriste sans brumisateur, un parlêtre décu par une amitiède ou comme un chinoisif dans une rizière en feu. Ses idées étaient aussi mouvantes que celles des vachequiriens – c'est ainsi qu'il nommait les politiques – des hommelles, des occiputrides et des retarés de la société soi-disant idéale qui tentaient d'habriter le solitunnel de sa pensée.
Dans ces de ne pas mourir de barbarire, il se livrait au silencinant vertige de l'oubli. Parfois, cependant, la constipassion le poussait jusqu'au délire verbal. Le pharmacien de son quartier lui enviait cette maladie qui, lorsqu'elle s'aggravait, provoquait chez lui des bouffées de poésie. C'est pourquoi d'ailleurs il avait choisi la profession de littéraccoleur. Son dernier roman, "Emmanuelfe et le supermatozoïde" n'avait pas encore trouvé d'éditeur. Cependant il ne désespérait pas. Il estimait que la raisonnance l'aiderait à avancer dans la vie et à se faire connaître au-delà des contre-allées de son village. Bien sûr il n'avait pas eu dans sa jeunesse la baccalauréattitude, mais les diplômes étaient-ils véritablement nécessaires pour écrire des romans érotico-mystiques ?
Dans ses moments de doute il trompait son ennui en imaginant que Léonie, sa voisine de palier, une méchanteuse à la voix improbable, se livrait avec son ordinamant à un jeu essensuel et sans cesse répété. Il se demandait même si elle pouvait amourir pour sa machine virtuelle et ça le rendait un peu jaloux. Il l'imaginait en train de vagigoter avec ardeur devant une machine qui n'avait même pas d'écran tactile. Cependant il se sentait terrorrifié à l'idée qu'elle lui demanderait un jour de la sexsonariser. Elle réclamerait un canicunilingus ou une séance de constitutionanisme. Face à cette dévoreuse d'amour il manquêterait certainement de patience et le cadeaurore qu'il devrait lui faire au réveil ne serait certainement pas celui qu'elle attendait. Il habitait sur un mormonticule et il aurait certainement du mal, le lendemain matin, à retrouver son domicile après une longue nuit de caniculte.
Pour calmer son esprit toujours prêt à s'évader, il décida de sortir. Il opta pour la marche à pied car il ne voulait pas micheminer ses chances de rester calme. Il lui fallait oublier, le temps d'une promenade, ses idées rebelles et sa maison en désordre. On se serait cru chez un adoubementier du Moyen Age. Victime de la publicité ubiquitaire et consommassommante, il avait accumulé toute une série d'ustensiles et d'objets curieux dont il n'arrivait pas à se débarrasser : un ordinosaure, un paraventilateur, une varton, une lampe à pétropique, un bancrochepied, des ridéaux, un accordéolien qu'il avait reçu au dernier révermillon, un biberonfleur assez bruyant mais en bon état, une paire de casserollers très appréciés pour leur voyagilité, un japoney en peluche acheté dans hippocampement, un frigodemichet, une petite barque qu'il n'avait jamais réussi à canommer, un coqualicot, une pipe caniculottée sans précaution, un bac à glassonnerie, un couteau à campain, une descente de lit qui sortait tout juste de chez le tapiculteur et un livremort, pas très gai mais pas cher non plus, qui était en fait un gros traité de généalogis. Il avait fini par éprouver une graversion pour son tas de briques. Un jour il le quitterait pour de bon et personne ne saurait où le retrouver.
Afin de se changer les idées il tenta de se rappeler le chiffre de l'émunération des travailleurs compertinents mais cet artifice échoua car il avait du mal à estimer la valeur de l'argentil. Il se mit à penser à la dernière conquête qu'il lui restait à faire, une jeune femme avenante dont il venait de s'amourager et qui n'était autre que la caissière de sa banque. Il décida de se rendre à son guichet pour voir si, cette fois, il oserait lui demander son prénom et tenter d'en faire son élasticœur.
Il s'emprimata vers l'agence et, après avoir été autorisé à franchir le sas, vers la dame de ses pensées. Il aimait venir dans ce lieu sans gloire parce qu'il savait y rencontrer la seule personne qui le faisait encore rêver. N'avait-elle pas des yeux couleur d'arc-en-ciel, ce qui lui rappelait son ordinatheure préféré ? Ne lui donnait-elle pas de l'argent à chaque fois qu'il lui en demandait ? Il était prêt à dire n'importe quoi pour attirer son attention, lui béavouer son désir, mais elle l'impressionnait et il se mit à la lubrifixer sans rien dire. Lorsqu'il osa enfin se risquer, la première phrase qui lui vint à l'esprit fut : "Encore un potindécent. On dit que Patrick Bruel va écrire lui-même ses chansons." La caissière baissa les yeux et entreprit de passer avec insistance et modestie une jolime sur l'extrémité de ses ongles en forme de calebasse. Elle se décida enfin à répondre:
- Oui. Mes journaux favoris, "Voilà" et "Glacis", le confirment. Je l'ai lu également dans un marabouquin qui traînait chez ma coiffeuse, "Les immondains".
Le satire-larigot contemplait avec insistance les élastimousses qui ornaient les cheveux couleur de prune de celle qu'il convoitait. Il voulait, à tout prix, connaître son prénom et il eut soudain l'envie de la voutoyer. C'est alors qu'il aperçut à son annulaire gauche un anneau d'or qu'il ne lui connaissait pas, ce qui le fit rougir de dépit. Constatant le trouble de son client, désireuse de couper court à toute initiative qui la mettrait mal à l'aise, la jeune femme déclara avec un sourire distancié qu'elle venait d'épouser le directeur de l'agence. C'était un chagringalet que le satire-larigot, contrairement à son chèque mensuel, n'avait jamais pu encaisser. Abasourdi par la nouvelle, il sortit de la banque sans même réclamer un bordeuro.
Révolté, inconscieusement blessé et le cœur pointillant, il se dépêcha de rentrer chez lui. Pour mieux se venger, il voulait ajouter à son blog un billet absensuel dont il avait déjà le titre: "La corrupture". Au début il avait été un gandibloggeur sans problème, puis son humeur était devenue mélancoulissante et blogrégaire. Il versait souvent des pleurres avec un manque de sincérité qui l'effrayait lui-même. Il avait bien essayé la pepsichanalyse mais ça n'avait rien changé. Il gardait en lui une tristespérance à toute épreuve et arrimait sur la toile, au moindre prétexte, des intituliens d'une grande noirceur, sans jamais pouvoir les ordifférer. Il n'était pas le seul, mais il était le plus nostalgique. La croissance de Gandi, qui suivait une progression blogarithmique, aurait dû le rassurer mais il était trop tard. Il allait quitter, sans regret, un monde où il n'avait plus sa place.
Il prit possession de son clavier, caressa machinalement sa souris et commença à rédiger une longue diatribe sur l'inutilité des amours contrariées, surtout quand elles n'ont jamais commencé. Comme il n'y avait plus de femme à conquérir dans son village il en vint à la conclusion qu'il était temps de se perdre dans les méandres du virtuel. Pour se venger, et avant d'entrer pour l'éternité dans la blogalaxie, il décida – dernier acte solennel et grandiose de son aventure humaine - que la banquaissière s'appelait Gertrude.