Droit des mots
Par le gardien le lundi 12 mars 2007, 00:00 - Gardimots - Lien permanent
Pan-Organisation Internationale de
Linguistique
(P.O.I.L.)
DÉCLARATION
UNIVERSELLE DU DROIT DES MOTS
adoptée par l'Assemblée générale extraordinaire du 11 mars 2007
résolution 217 A (III)
Préambule
Nous mots et vocables de la
langue française, considérant :
Que notre appartenance au capital culturel de l'humanité est un droit
imprescriptible,
Que la reconnaissance de cette appartenance est un fait capital pour l'avenir de l'humanité,
Qu'il est essentiel d'encourager la perpétuation des traditions propres à la langue française ainsi que le développement de nouveaux modes d'expression,
Que notre intégrité et nos règles d'utilisation sont inaliénables, même s'il est souhaitable et nécessaire d'admettre leur évolution naturelle sous l'influence de l'usage courant,
Que la méconnaissance et le mépris de nos droits fondamentaux conduisent à des actes de brutalité langagière tels que SMS, impropriétés, solécismes, barbarismes, pataquès, fautes d'orthographe, et mettent en danger la liberté d'expression ainsi que la communication évolutive et responsable,
Que des égards spécifiques doivent nous être accordés, en particulier celui
d'être utilisés en fonction des règles de la syntaxe, de l'orthographe et de la
grammaire,
Proclamons ce qui
suit.
Déclaration
Article 2. Chaque mot peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans aucune discrimination, notamment d'étymologie, de définition ou de toute autre condition linguistiquement pertinente.
Article 3. Tout mot a droit à l'usage courant, littéraire, artistique et technique de sa signification, et ce sans distinction de contexte. Il ne sera fait aucune discrimination fondée sur le statut lexical, philologique ou sémantique du pays ou du territoire francophone dont un mot est originaire, ou dans lequel il est en usage.
Article 4. Nul n'a le droit de tenir un mot en servitude ou d'en interdire l'emploi, quelle qu'en soit la raison.
Article 5. Aucun mot ne sera soumis à la torture grammaticale, ni à des peines ou traitements cruels ou dégradants d'ordre syntactique, sauf circonstances particulières dûment reconnues par la communauté des écrivains, lecteurs et utilisateurs francophones se réclamant du domaine de la libre création.
Article 6. Chaque mot a droit à la reconnaissance de ses particularités lexicales en tout lieu et sur tout support de communication.
Article 7. Tous les mots de la langue française sont égaux et ont droit sans distinction à une égale protection de la part des utilisateurs, enseignants, auteurs, et de toutes les personnes qui les utilisent dans les conversations courantes. Ils ont droit à une protection égale contre tout acte qui violerait la présente Déclaration et contre toute provocation à un tel acte.
Article 8. Tout mot a droit à un recours effectif devant les instances universitaires et académiques compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par l'usage et les règles.
Article 9. Nul mot ne peut être arbitrairement interdit ou torturé, que ce soit volontairement ou par maladresse.
Article 10. Tout mot a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un jury indépendant et impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation en matière linguistique dirigée contre lui.
Article 11. Tout mot accusé de desservir la cause de la langue française est présumé innocent jusqu'à ce que sa culpabilité ait été établie au cours d'une instruction publique où toutes les garanties nécessaires à sa défense et à son illustration lui auront été assurées.
Article 12. Nul mot ne sera condamné pour des connotations ou dénotations qui, au moment où elles ont été établies, ne constituaient pas un acte délictueux au regard des règles communément admises en matière de langue française.
Article 13. Nul mot ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa définition, sa légitimité, sa classification ou sa vie littéraire, ni d'atteintes à son univers paradigmatique ni à sa réputation. Tout mot a droit à la protection des autorités linguistiques contre de tels agissements.
Article 14. Tout mot a le droit de circuler librement à l'intérieur d'une conversation, d'un discours ou d'un écrit. Tout mot a le droit de quitter l'esprit ou la mémoire d'une personne qui ne serait pas compétente pour l'utiliser ou qui n'en aurait pas l'usage, et d'y revenir quand les circonstances lui sont de nouveau favorables.
Article 15. Tout mot français a le droit de chercher asile en d'autres langues et d'en bénéficier.
Article 16. Tout mot a droit à la liberté d'association. Nul ne peut le contraindre à l'isolement linguistique ou à la réalisation d’une alliance qu’il n'aurait pas désirée.
Article 17. La famille de mots est l'élément naturel et fondamental de la société linguistique. Elle a droit à la protection de tous les utilisateurs.
Article 18. Tout mot a droit à la liberté de changer de paradigme ou de définition ainsi que le droit de résister à un emploi abusif. L'antisémantisme est formellement identifié comme contraire aux lois lexicologiques.
Article 19. Tout mot a droit à la liberté d'expression, ce qui implique le droit de véhiculer des informations, des sonorités et des idées explicites ou potentiellement incluses dans sa définition.
Article 20. Tout mot a le droit d'accéder, dans des conditions d'égalité, aux fonctions signifiantes de la langue française.
Article 21. Tout mot est fondé à obtenir satisfaction sur le plan des droits culturels indispensables à sa dignité et au libre développement de sa polysémie.
Article 22. Tout mot a droit à une protection contre les fautes d'orthographe et les impropriétés de langage.
Article 23. Tout mot a le droit de fonder avec d'autres mots des mots valises, calembours, contrepèteries et autres impertinences langagières susceptibles d'enrichir la langue française ou de la mettre en valeur.
Article 24. Tout mot peut être inusité pendant un temps si long qu'on pourrait le considérer comme suranné. Il doit cependant rester à la disposition des utilisateurs potentiels dans tout lexique, garde-mots, glossaire, dictionnaire, encyclopédie, vademecum correspondant à son emploi principal ou annexe.
Article 25. Tout mot a le droit de prendre part librement à la vie culturelle de la communauté francophone, de participer aux progrès linguistiques et aux bienfaits qui en résultent.
Article 26. Tout mot a des devoirs envers l'étymologie de laquelle il procède et qu'il doit servir au mieux des intérêts de ses utilisateurs.
Article 27. Aucune disposition de la présente Déclaration ne peut être interprétée comme impliquant pour un État, un groupement ou un individu un droit quelconque de se livrer à une activité langagière ou d'accomplir un acte de parole visant à la destruction des droits et libertés qui y sont énoncés.
Article 28. L'Assemblée Générale Extraordinaire de la Pan-Organisation internationale de Linguistique (P.O.I.L.) proclame la présente Déclaration Universelle du Droit des Mots comme étant opposable à tous les locuteurs francophones. Elle représente l'idéal commun à atteindre par tous les mots et tous les utilisateurs afin que tous les individus et tous les organes de la société francophone, ayant cette Déclaration constamment à l'esprit, s'efforcent, par l'enseignement et l'éducation, de développer le respect de ces droits et libertés et d'en assurer, par des mesures progressives d'ordre sémantique et philologique, la reconnaissance et l'application universelles et effectives, tant parmi les populations francophones que par ceux qui, venus de paradigmes linguistiques différents, cherchent néanmoins à comprendre leur raison d'être ainsi que les beautés de la langue française.
Article 29. Les mots ont droit à une existence propre, c'est-à-dire indépendante de l'avis de ceux qui les prononcent ou les écrivent. Ils peuvent déposer plainte contre toute phrase dans laquelle la garantie de leurs droits n'est pas assurée.
Article 30. Les mots ont le devoir de ne pas porter atteinte à la dignité de ceux qui les emploient dans leur activité courante, en particulier les êtres humains.
Article 31. Le présent texte a une portée universelle. Il est applicable en tout lieu et en tout temps, sans aucune dispense, même s'il est avéré que celle-ci possède un fondement juridique, économique ou historique. Il devra être affiché dans tous les lieux servant de siège aux organisations internationales, gouvernements, ministères, médias, associations à but non lucratif et sociétés commerciales utilisant la langue française comme moyen d'expression à titre principal ou complémentaire. Il sera appris par cœur par les enfants des écoles et les élus républicains.
Commentaires
Puisque la perche est tendue, saisissons-la:
Que voilà un billet au "P.O.I.L" !
Quelle fabuleuse idée ! Voilà un texte fondateur et historique ! Mes sincères félicitations !
Avec un tel P.O.I.L., nous serons tous poilus.
Géniale ton idée. Merci.
Je n'ai pas encore pris le temps de tout détailler, mais voilà ce que j'attendais des politiques lorsqu'ils nous ont proposé une constitution européenne : le plus grand et le plus petit dénominateur commun, courte et complète.
Complètement hors sujet, ma brève.
Je réponds globalement :
- dans l'article 5 j'ai pris le soin de spcéifier : "sauf circonstances particulières dûment reconnues par la communauté des écrivains, lecteurs et utilisateurs francophones se réclamant du domaine de la libre création".
- articles 7 et 9 : cette Déclaration ne doit pas être prise au premier degré, comme tu le fais ...
Félicitations : un tour de force remarquable.
Mais qui va vous protéger des manipulateurs des mots – dans la politique, dans le journalisme, dans le management, dans tous ces demi-mondes littéraires, peuplés par ‘écrivains, lecteurs et utilisateurs’ selon ton article 5 – mais qui ont pour but la conquête du monde par la charabia ? (Merci pour ce mot, blog de décembre 2005....je t’offre en échange les mots anglais mumbo jumbo et gobbledygook, tous les deux bien expressifs je pense.)
Citoyen d’une société sans constitution écrite, je dois me confier au mœurs et usages non réglementés. C’est dangéreux mais stimulant. Je te donne comme références ce personnage célèbre de la littérature anglaise, Humpty Dumpty :
- Moi quand j’emploie un mot, dit Humpty Dumpty d’une voix assez méprisante, il signifie exactment ce que je veux qu’il signifie, ni plus ni moins.
- La question est, dit Alice, si vous pouvez forcer les mots à signifier tant de choses différentes.
- La question est, dit Humpty Dumpty, qui sera le maître, c’est tout.
Thank you, Richard. As a token of our long lasting close relationship I make a tremendous exception here, and answer you in English. As a matter of fact, I am a self-proclaimed word-guard and this is a bit of a risky appropriation. Anyhow, when I see how French language is treated, I keep on. I don't want to see such a thing being a common feature on my blog. I love so much English language as well, as you know. Anyhow I want it beeen celebrated beyond Channel and Ocean areas. See you anytime on this blog.
Merveilleux, cette déclaration fonctionne aussi pour la Belgique !
Si on l'applique, il risque d'y avoir beaucoup de condamnations qui tombent, surtout sur les skyblog !
Déclick, tu as peut-être remarqué que cette déclaration émane d'un organisme international, le POIL (Pan-Organisation Internationale Linguistique). C'est donc normal que la Belgique se sente concernée. De plus ça me fait plaisir, j'ai une grande sympathie pour les gens d'outre-quiévrain (comme on peut dire, vu de la France). Bon j'arrête ici mon discours géopolitiquement incorrect.
José, l'article 19 est justement celui qui s'oppose - plus que tout autre - au politiquement correct. J'arrête, j'attends que quelqu'un me dise que mon billet est une déclaration d'amour à la langue française ... En tout cas telle était mon intention au départ.
Je suis d'accord avec toi. J'ai eu beaucoup de mal à comparer les articles entre eux. Il reste peut-être encore des incohérences.
et qui a le dernier mot: le mot dit par l'homme ou l'homme qui a dit le mot?
L'écho, les connotations, le sens symbolique, l'inspiration ...
le mot est un véhicule, moteur des sens (décence,d'essence): la vraie valeur est celle du conducteur ?
Je suis sûre que le Ministre De Robien fréquente le garde-mots, ce n'est pas possible autrement. À nous de trouver son pseudo ! Aujourd'hui sur les ondes, il a déclaré qu'il fallait donner une nouvelle place aux mots à l'école primaire : il a inscrit au programme de la rentrée, des leçons de mots ! (postcastez france Inter, journal de 19h...). Je n'en reviens pas ! Après le garde des sceaux, à quand un poste de garde des mots ?
Je sais que la mode est à l'égalitarisme et s'il est juste de dire que les mots sont égaux en droit, je trouve que certains sont plus égaux que d'autres à cause du signifié, à cause du contexte...
Il m'est arrivé de voir des mots s'excuser de figurer dans les grands textes classiques, de courir se cacher de honte en bas de page,car ils pressentaient que ce fourbe d'astérisque leur ferait porter l'étoile du bannissement, en les emportant dans le lacis des notes en petits caractères, qui confirmaient leur mauvaise opinion d'eux-mêmes et la présomption des élèves dont l'ignorance était ainsi flattée.Sous le regard résigné du maître, ces vocables "bizarres" seraient frappés d'ostracisme(que dis-je?l'ostracisme était censé durer "seulement" dix ans à Athènes),seraient condamnés à l'exil définitif: on les laisserait mourir de consomption,par un désaveu d'ingratitude.Leur bannissement a touché tant d'autres de leurs pareils, qu'on envisage à juste titre de sauver aujourd'hui certains d'entre eux du dépérisssement lexical par l'apprentissage systématique du vocabulaire à l'école : une initiative heureuse mais sans doute tardive.
La Défense de la langue en crise de "désamour" que nous présente notre Gardien des mots tient du diagnostic,de l' acte de foi pathétique,mais sans pathos,et dont la jubilation "sub-liminale" est une force d'espoir.
C'est vraiment une très belle Déclaration d'amour à la langue française, qui allie tradition et création, la première étant le terreau de la seconde.
Gérard Guillot
Je n'y vois pas d'inconvénients, au contraire. J'ai écrit ce texte pour le français mais il peut s'appliquer à toues les langues.
quelle source d'inspiration!!! j'aime autant cette création que les commentaires qui s'ensuivent.... quand à la réforme de l'enseignement.. soyons pour!certains instits n'ont pas attendu pour remettre la liste de mots quotidienne en vogue. et à noter que pour certains dysorthographiques, cela leur permet d'avoir des 20 sur 20 à une dictée!!! cela dit attention à conserver les moyens de converser même par controverse sans renverser, ni inverser et le processus d'évolution d'une langue qui se doit de rester vivante ..ah mais là je suis trop sérieuse , je sens que je casse l'ambiance.. je repasse vite en "mode-lecture" et vous rend la toile...
Je crois que vous etes devenu mon ami,celui qui ne pose pas de question,ne demande pas de compte,pas très bavard,mais à qui,je peux tout dire.Dommage,je n'enregistre pas pour mes enfants,mais tant pis,ce que je pense faire dépasse largement la progéniture.De plus,je ne peux rien en garder,pas experte en ordi.impossible de l'imprimer,choix sans doute intentionnel du hasard,j'ai l'habitude des choix testés,ils ne m'auront jamais,je suis bien trop sincère pour tous.
Ver0, attention, j'effacerai vos commentaires au fur et à mesure tant que vous ne les mettrez pas ici : Catharsis. Je ne vous censurerai pas tant que les choses resteront polies et cohérentes (je ne parle pas pour vous en particulier, je donne seulement la règle du jeu).
rien à dire vous avez vraiment trouvez les mots qu'il. votre texte est tout simplement fabuleux
Merci, ça fait vraiment plaisir.
vraiment génial,
bravo !
bonjour Garde,
Mercredi dernier : soixantième anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme.
Ce sujet est donc devenu le thème de la semaine sur mon blog personnel (qui, contrairement au vôtre, n'est pas un blog à thème).
Le Droit des Mots m'a paru tout aussi important que les Droits des Hommes et des Femmes. J'en ai donc rédigé un article : http://avent2007.unblog.fr/2008/12/...
J'espère que cette utilisation vous conviendra....
Bonne suite à vous et à très bientôt !
Hervé
PS : j'attends vos voeux avec beaucoup d'impatience.
Oui, bien sûr, ça me convient, et même ça me fait très plaisir. Un grand merci.
Parfait !
Merci à vous et à très bientôt !
merci bien pour cette declaration
Merci de l'adopter.
Réponse "comme par hasard" (car il est déjà prêt) dans le billet de demain...
Article 30. "Les mots ont le devoir de ne pas porter atteinte à la dignité de ceux qui les emploient dans leur activité courante, en particulier les êtres humains."
J'ajouterai :"Les mots ont le devoir de ne pas porter atteinte à la dignité de ceux qui les RECOIVENT dans leur activité courante, en particulier les êtres humains."
Il est vrai qu'il s'agit d'un héritage à respecter et à transmettre.