Les pilules perpétuelles
Par le gardien le lundi 24 novembre 2008, 00:00 - Singumots - Lien permanent
L'antimoine est un métal blanc-bleu,
cassant, dont le minerai principal est la stibine. Il partage avec l'eau la
propriété d'être plus volumineux à l'état solide qu'à l'état liquide. Les dames
de l'Antiquité, principalement les Égyptiennes, se servaient d'une pâte à base
d'antimoine, en quelque sorte l'ancêtre du khôl, pour noircir leurs cils et
leurs sourcils afin de rehausser l'éclat de leur regard. C'est le plus ancien
cosmétique connu. Hippocrate, Galien, Pline (qui le désigne sous le nom de
Stibium), Dioscoride, mentionnent dans leurs écrits l'usage de
l'antimoine. Il fut isolé et employé en tant que médicament par un moine
bénédictin du XVe siècle, Basile Valentin, de
nationalité allemande, qui a voulu s'entourer de mystère. On sait peu de choses
sur lui, sinon qu'il était alchimiste, ce qui explique sans doute sa
discrétion. On pense même que le nom sous lequel on le connaît est un pseudo-
nyme. Il est curieux qu'un moine ait pu découvrir ... l'antimoine. La légende
prétend que Valentin, ayant appris que des porcs de sa région engraissaient
facilement lorsqu'on incorporait à leur alimentation les résidus d'un certain
minerai, eut l'idée d'en faire absorber, pour leur plus grand bien, à ses
frères en religion. En fait ceux-ci moururent. Il venait de découvrir les
dangers du "loup gris des philosophes" ; c'est de cette aventure que le métal
tirerait son appellation. L'antimoine fut remis en honneur un siècle plus tard
par Paracelse, un médecin suisse qui a laissé son nom dans l'histoire de
l'humanité. Il se servait de l'antimoine comme d'une panacée, c'est-à-dire un
médicament susceptible de guérir toutes les maladies. Par la suite une
controverse naquit : les médecins n'étaient pas tous du même avis sur l'intérêt
de son usage. Les disputes furent si violentes que le Parlement français
interdit l'antimoine. En 1666 la Faculté de Médecine de Paris, avec à sa tête
Guy Patin (1601-1672),
finit par admettre son efficacité et à le faire réhabiliter par le Parlement.
Son utilisation devint courante avec son inscription au Codex de 1638 et la
guérison de Louis XIV par cette médication. On s'en servait comme sudorifique
et émétique (pour faciliter les vo- missements). Ainsi presque deux siècles
furent nécessaires pour que le premier médicament chimique fit son entrée dans
la pharmacopée française.
On utilisait par ailleurs l'antimoine sous
forme de petites billes métalliques de 30 centigrammes environ contenant
également du tartre blanc et du salpêtre, que les patients avalaient pour se
purger. Comme elles étaient rendues à peu près intactes une fois leur action
mécanique (et chimique) achevée, récupérées à l’aide d’une passoire et lavées,
qu'elles servaient indéfiniment et qu'elles se transmettaient de génération en
génération au sein d’une même famille, on les appelait les pilules
perpétuelles. Elles portaient également le nom de boules de
Nancy.
[Retrouvez ce billet dans
L'Almanach 2010 du Garde-mots]
L'Almanach 2010 du Garde-mots]
Commentaires
Vous ne pouvez pas parler du sujet du billet, plutôt que de perpétuellement voyager dans le cosmos ?
Oui, intéressant même si la pilule passe mal.
Cela m'a poussé à rechercher le nom d'un végétal dont j'avais entendu parler et contenant le mot "moine". J'ai retrouvé : le datura stramoine, qui n'a rien à voir étymologiquement et serait la déformation du grec "strychnos manicos".
Il y a beaucoup de chose dans le Garde-mots, même le datura !
salut à toi garde des mots
Je viens de trouver "acratopège" dans le "cabinet des curiosités" (cagibi9), et comme j'ai un réflexe "garde-mot", j'ai verifié ...
je n'ai trouvé qu'un rapide commentaire de 2006 sur un attrappe mouches
PS Mon poeme mutlicontrepété est en stand-by
Merci pour ce mot que je ne connaissais pas (et heureusement...).
Acratopège. Sans qualités particulières. Qui a, en parlant d’une eau, une faible teneur en sels minéraux. Du grec ancien akratos, pur, sans mélange, et pêgê source, fontaine .
Je m'interroge: y-aurait-il un lien entre la pilule perpétuelle et la politique?
Vous voulez dire qu'on nous dore la pilule ?
Carabinovitch (qui signe également "Carabin", "Le garde a une gueule de poivrot", "Ostracisé", "Germaine", "Je suis d'accord avec Littré", "Carabin IHP", "Le vulgaire", "Carabin le maudit", "Incarabin", "Correctoraraison", "The K rabbin", "Boudinblanc et blancboudin", "Mais t'as vu ta gueule ?" , "Gros plouc de garde !", "Homo Nîmes", "Porcinophobe", "Carabin ostracisé" ) m'insulte régulièrement. Pour une fois que son commenatire est à peu près poli, je le laisse passer.