Jargon
Par le gardien le vendredi 25 mai 2007, 00:00 - Métamots - Lien permanent
Terme péjoratif, voire polémique, qui qualifie un langage inintelligible. Il peut s'agir :
• du langage propre à un groupe socioculturel, difficilement compréhensible pour les non initiés, et dont le fameux référentiel bondissant est un exemple désormais classique. Il a des fonctions économiques (mieux décrire les réalités propres à ce groupe) et identitaires (il induit la complicité et la cohésion). D'ailleurs au Moyen Âge le mot "jargon" désignait la langue secrète des malfaiteurs.
• du langage formé par l'interférence de plusieurs langues.
• du langage employé par quelqu'un qui a une connaissance imparfaite d'une langue.
Synonymes : amphigouri, argot, bafouillage, baragouin, bigorne, bredouillage, charabia, galimatias, javanais, jobelin, langue verte, largonji, louchebem, narquois, patagon, patois, pidgin, sabir, technolecte, tortillage, volapük.
Étymologie : de la racine onomatopéique garg qui désigne la gorge et les organes voisins. Conformément à son sens étymologique le terme a été employé autrefois pour désigner le langage des oiseaux :
Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie,
Et s'est vêtu de broderies,
De soleil luisant, clair et beau.
Il n'y a bête ni oiseau
Qu'en son jargon ne chante ou crie :
Le temps a laissé son manteau !
Rivière, fontaine et ruisseau
Portent, en livrée jolie,
Gouttes d'argent, d'orfèvrerie,
Chacun s'habille de nouveau :
Le temps a laissé son manteau.
Commentaires
L'idée de Voltaire concernant les langues, dans son célèbre Dictionnaire philosophique,était que, malgré leur imperfection, il ne fallait point qu'elles fussent "corrompues" par des formes vulgaires, que les grands auteurs avaient définitivement fixé notre idiome.
Etonnant sous la plume de ce chantre du progrès!... dont il ne pouvait pressentir la puissante accélération.De sorte qu'aujourd'hui,la limpidité des textes classiques recèle des formes s'apparentant pour beaucoup à un code "jargonesque", et que le morcellement de notre langue actuelle en ses formes techniques de grande rudesse amplifie de son côté la confusion.Il en résulte un aplatissement et appauvrissement de nos échanges qui se réduisent à de simples repères de lieu, de temps, d'activité...que nous "réactivons"par des mots passe-partout,en dépit d'un enrichissement lexical théorique,en de multiples domaines.Difficile, dans ces conditions,d'éviter les quiproquos,les malentendus,les dissonances,ainsi qu'une certaine forme de solitude pour le non-initié.
Il est vrai que les nouveauté (techniques, en particulier) engendrent de fait un élargissement du vocabulaire, une adaptation de la syntaxe, un renouveau de la grammaire.
Douceur intimiste exquise du poème de Charles d'Orléans,proposé par le Gardien, dépouillement du vocabulaire, ton enjoué...Mais entre le "jargon" de l'oiseau et celui de la volière dans laquelle nous voici maintenant enfermés,que de transformations!La lecture de ce texte qui est chant, nous fait prendre conscience de notre modernité un peu tour de Babel,tout en nous offrant l'occasion de nous désaltérer à d'humbles sources qui chantent dans la lumière et que des mots simples rendent universellement limpides.
un passage de "intello academy " de corrine mayer qui se moque des jargons
"internet est un rhizome qui disqualifie les procédures d'authentification des discursivités ; la question se pose : comment réinstitutionnaliser ? Quelles centralités sont reconnues, et par qui, pour légitimer ce discours plutôt que tel autre ?"
Qui veut traduire ?
Internet est un réseau incontrôlable. Comment des instances légitimes pourraient-elles le reprendre en main ?
Une reprise en main, oui c'est cela, face au joyeux et donc dangereux bordel de la toile . Les castes n'aiment pas cela et derrière le jargon se cache souvent la volonté de contrôler... enfin je crois