Valentine de Milan
Par le gardien le lundi 22 juin 2009, 00:00 - Gardimots - Lien permanent
Valentine de Milan pleurant la mort de son époux Louis d'Orléans.
Fleury-Richard.
Huile sur toile. Musée de l'Ermitage. Saint-Pétersbourg. 1802.
Valentine est inconsolable. La devise qu'elle a fait graver sur les murs du château de Blois, où elle s'est retirée, en est témoin: « Rien ne m'est plus, plus ne m'est rien », autrement dit « Je ne me soucie plus de rien ». Elle ne survivra d'ailleurs qu’un peu plus d’un an à son époux.
Le charme désuet - le charme certain – de ce tableau est en adéquation avec la scène qu'il représente. Le peintre a situé son modèle dans l’embrasure d’une fenêtre, ce qui lui permet d’introduire une lumière latérale à la manière des maîtres hollandais du XVIIe siècle. Savamment dosée, cette lumière nous révèle une femme brisée, au regard perdu, prisonnière du sort que la vie lui a réservé. En habit noir du XVe siècle, assise sur un coussiège, repliée sur elle-même, elle incarne, dans ce décor austère mais raffiné, la mélancolie et le deuil sans fin.
La composition du tableau est savante. Le « cadre dans le cadre » (le rectangle périphérique) en est la principale originalité. Valentine se tient près de la fenêtre, comme si elle attendait indifféremment le retour de son mari ou la mort. La diagonale du bord du rideau vert et celle - plus virtuelle - du lévrier qui la console, se croisent en pleine lumière, ce qui laisse une petite place à l'espoir. Au sommet de la composition la vouivre (biscione en italien) est le symbole de la maison des Visconti et de la ville de Milan. Au centre, un parchemin et un livre, semblent nous dire que la connaissance divine aura bientôt raison de la vie terrestre de Valentine.
L'idée de cette scène de genre serait venue à l'esprit du peintre lyonnais Fleury François Richard, dit Fleury Richard (1777-1852), à l'occasion d'une visite au musée des monuments français, créé en 1795 dans le couvent des Petits Augustins, où étaient exposés les tombeaux de Valentine et de Louis. Fleury Richard, qui fréquenta l’atelier de Jacques-Louis David, est, à son époque, l'initiateur et l’un des principaux représentants du style « Troubadour ». Ce tableau, qui a appartenu à l’impératrice Joséphine, est d'ailleurs l'acte de naissance de l’art troubadour, qui constitua un véritable phénomène de mode dans les années 1820-1830. Ce style est caractérisé, dans le domaine de la peinture, par des œuvres médiévalistes, intimistes, narratives, voire édifiantes. Il renforce, à l'époque, le goût pour la scène de genre et l'historicisme. Le Moyen Âge reconstitué, anecdotique, est presque imaginaire, en tout cas idéalisé. L'art néogothique devient ainsi avec Fleury Richard l'emblème d'une nouvelle esthétique qui annonce le romantisme. Il sert également de prétexte à la résurgence du nationalisme et du catholicisme.
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Commentaires
Très juste. On observe effectivement un procédé de mise en abyme du cadre, qui se répète autour de Valentine, dans la fenêtre et plusieurs fois à l'intérieur même de la fenêtre. La présence du livre ouvert, non regardé, lui confère le rôle de médiateur, oui, entre sentiment et raison entre le réel symbolisé par la matière, les matériaux de la pièce et la fuite vers la lumière (souvent métaphore de l'au-delà), comme le parchemin, symbolisant aussi bien les écrits précieux que la parole sacrée.
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La courbe du corps est aussi très intéressante et traduit le désespoir, la langueur, l'angoisse, le vide intérieur.
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Zed
C'est mieux que Pâté sur Arlette.
Avait-elle de tout petits petons, Valentine?
La terre est basse. Tout ce que je sais c'est qu'elle avait des petits tétons.
Découverte de votre garde-mots . J'ai faim !!
Merci, Dandylan. Tu m'as appris quelque chose d'intéressant. Ça méritait une correction.
Valentine de Milan, je trouve quand même qu'elle ne fait pas son âge. Ze:D
Valentine de Milan est devant une bien belle fenêtre. Et nous fort heureusement n'en recevons plus sur ce blog!
Merci pour vos mots