Le Garde-mots

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vendredi 6 novembre 2009

Apoptose

Mort programmée des cellules. Tout au long de notre vie les cellules en état de vieillissement s'autodétruisent sous l'influence d'une programmation génétique. Il s’agit d’un phénomène naturel qui assure la qualité de nos tissus et donc de notre santé. Il commence dès le stade embryonnaire, au cours duquel la sculpture du vivant se fait par élimination de cellules, ce qui permet l’émergence de la forme des organes, le modelage du cerveau, par exemple. Par la suite, l’apoptose nous débarrasse des cellules vieillissantes. Dans le corps humain 100 milliards de cellules meurent  ainsi et renaissent chaque jour. À l’inverse, la perte de la capacité à s'autodétruire explique la prolifération sans fin de certaines cellules. C’est ainsi qu’on explique actuellement la survenue du cancer et des maladies de l’immunité. Du grec apo, au loin, et ptosis, chute. En grec ancien le mot apoptosis désignait la chute des feuilles des arbres en automne. Homère l’emploie dans ce sens.

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lundi 17 décembre 2007

Mars ou crève

MarsMars est le titre bref et guerrier d'un essai autobiographique dans lequel Fritz Zorn (1944-1976) analyse de manière simple et lucide le lien entre son cancer et son éducation. Il est mort à trente-deux ans, le jour même où son éditeur devait venir à l'hôpital lui annoncer qu'il acceptait son manuscrit. Il ne saura jamais qu'il a laissé un livre important.

Né à Zurich sur la bonne rive du lac, celle qu'on appelle "la Rive dorée", il grandit au sein d'une famille aisée où règne une harmonie si parfaite qu'il en mourra. Enfant tranquille, poli, résigné, "terriblement sage", il ne jure jamais, évite tout ce qui pourrait être grossier, impur. C'est un petit adulte qui vit dans une somptueuse villa où l'on aime "à être correct plutôt que vivant". Les tabous, les non-dits, les mensonges font que sa jeunesse se déroule sans histoire.

Une fois parvenu à l'âge d'homme il est seul, atrocement seul, et d'une timidité maladive. Il n'a aucune vie sexuelle, laquelle lui paraît répugnante aussi bien avec les femmes qu'avec les hommes. D'ailleurs il éprouve un sentiment de honte pour les réalités du corps, le mot même lui est insupportable. Il redoute sa propre nudité. Il a peur de rougir, ce qui provoque facilement, chez lui, une rougeur émotive. Il considère son cancer comme le résultat logique et implacable de sa vie sans relief, où le désir est interdit. Sans relief mais non sans joie car, s'il est lui-même dépressif et névrosé, il n'en est pas moins, à l'époque où il est étudiant en linguistique, l'ordonnateur des fêtes de ses camarades.

Il raconte son histoire pour tenter de découvrir comment il a pu être victime d'un lymphome malin, en quelque sorte il cherche à comprendre pourquoi il est sur le point de mourir libéré. Après une longue hésitation il tente de se sauver lui-même par la psychothérapie : elle lui permettra au moins de comprendre son histoire, si ce n'est de s'en débarrasser. Elle lui donne l'occasion d'inventer des expressions qui le protègent et nous donnent les clés de sa vie intérieure : "idiotie affective", "désespéré normal", "garant du milieu bourgeois cancérigène". Elles montrent à quel point ses défenses - le véritable fil rouge du livre, - constituent autant d'îlots de résistance.

Il écrit sous le pseudonyme de Fritz Zorn (colère) mais son patronyme est Fritz Angst (peur, angoisse). Choisi ou hérité, le nom derrière lequel il abrite sa désespérance est pétri de connotations négatives, encore que la colère constitue un progrès par rapport à l'angoisse. C'est un premier pas, une tentative symbolique pour aller vers l'extériorisation. Il est en colère contre la société policée, les banquiers suisses, la vie qui ne sait pas le retenir. La révolte est en marche, la haine gronde, la révolution pourrait bien avoir lieu, à moins que l'appel au Diable ne soit une tentation trop forte. En tout cas, de son aveu même, il est en état de "guerre totale".

La distance entre ce qui est exprimé et la réalité sous-jacente est sans doute ce qui fait tout l'intérêt de cette écriture froide, distanciée, comme détachée. L'extrême solitude, le manque d’amour, la négation des besoins sont analysés avec précision. Fritz décrit son refoulement natif, l'éducation rigide et conformiste qui va le tuer, sans jamais obliger le lecteur à entrer dans son désespoir, sans rechercher la compassion. Décrivant sa maladie il va jusqu'à employer la métaphore du nazisme. Il stigmatise les "bonnes intentions" de ses parents qu'il compare aux "bons Allemands" qui, dans les camps de concentration, n'avaient fait qu'exécuter les ordres du Führer. Comme il le dit lui-même, il "a été éduqué à mort" et cependant il est prêt à leur pardonner. Hélas pour lui, il nous quitte au moment où il est au bord de mettre des mots sur ce qui lui arrive : "Chaque chose a son nom, la mort a aussi le sien." Un tel livre, que la pudeur interdit de qualifier de littérature, encore moins de chef d'œuvre, ne laisse pas indifférent. Sa lecture est l'occasion de prendre une leçon de vie et ce n'est pas le moindre de ses paradoxes.


[Vendredi nous parlerons d'un autre livre
à la fois semblable et différent.]

lundi 15 janvier 2007

Arsenic

Élément métallique friable, de couleur gris acier, qui existe à l'état naturel dans le sol et les roches. Ses principaux minerais, le réalgar (AsS, arsenic rouge) et l'orpiment (As2S3, arsenic jaune) sont connus depuis l'Antiquité. Il fut isolé en tant qu'élément par Albert le Grand vers 1250. Le premier écrit sur sa préparation est signé Paracelse, médecin et alchimiste que l'on peut considérer comme le père de la toxicologie. Jeté dans le feu, il se volatilise sous l’aspect d'une fumée qui répand une forte odeur d'ail. C’est un poison très dangereux. L'exposition chronique à l'arsenic est un facteur de risque de cancer de la peau ou du poumon. Du grec arsenikos, mâle, à cause des propriétés puissantes de l'arsenic. Synonymes anciens : arsoine, mort aux rats.

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Le diable voulait passer par le Garde-mots ...
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Il existait autrefois en Europe, en particulier en Autriche dans la province de Styrie, des mangeurs d'arsenic. Leur but était d'acquérir plus de force physique, une respiration facile lors des courses en montagne, un teint florissant, de meilleures performances sexuelles et une plus grande résistance aux maladies infectieuses. Ils débutaient avec des doses faibles et arrivaient progressivement à tolérer des doses élevées.
[Retrouvez ce billet dans
L'Almanach 2010 du Garde-mots
]